Quelles sont les Implications Managériales et les Voies de Recherche qui ressortent de la littérature récente sur le Marketing Relationnel Bancaire ?
Mémoire de fin d’études
Romain BENBASSA (Janvier 2005)



Cadre d’analyse de l’étude
 

Depuis maintenant près de deux décennies, l’approche relationnelle a accaparé l’attention de plusieurs chercheurs et praticiens. Ceci est, entre autres, attribuable au fait que les consommateurs sont devenus de plus en plus exigeants et que la concurrence ne cesse de s’intensifier. Les entreprises ont alors saisi l’importance de se rapprocher du client et de le fidéliser.

En conséquence, Jackson (1985) affirme que le " marketing relationnel, ou le marketing ayant pour objectif d’établir des relations durables avec chaque compte individuellement, peut s’avérer extrêmement profitable lorsque cela est pertinent, mais cela peut-être aussi coûteux et inefficace dans le cas contraire ". Dès lors, il semble intéressant d’orienter les recherches sur les facteurs déterminants qui peuvent faciliter le management de ce marketing au sein des organisations.

Dans un contexte de concurrence accrue, l’industrie bancaire représente un domaine de recherche intéressant du fait de l’intangibilité des services et de la fréquence des interactions interpersonnelles. Effectivement, les organismes financiers s’orientent aujourd’hui de plus en plus vers une culture-client en redéfinissant des stratégies plus relationnelles (Ricard et Perrien, 1999).

L’objectif principal de cette étude visera donc à approfondir notre compréhension de l’approche relationnelle dans le secteur bancaire en tentant d’identifier les variables et facteurs qui facilitent son management au sein des institutions financières, répondant à la problématique suivante :

Quelles sont les implications managériales et les voies de recherche qui ressortent de la littérature récente sur le marketing relationnel bancaire ?

Dans les prochaines lignes, le concept du marketing relationnel est présenté. Puis, est exposée une brève revue de la littérature sur le marketing relationnel bancaire comprenant le cadre conceptuel préliminaire et les questions de recherche qui y sont associées. La section suivante synthétise les éléments de réponses à la problématique. Finalement, la dernière section présente les limites de l’étude et les voies de recherche et une conclusion à cette recherche.


Chapitre introductif au marketing relationnel bancaire

I.1. Passage d’une orientation produit à une orientation client

L’émergence du concept de gestion de la relation client est le résultat d’une lente évolution de la mentalité des entreprises et des réflexions académiques, et surtout d’une transformation des systèmes marketing (renouvellement des concepts, des méthodes et des pratiques).

Effectivement, le concept de marketing traditionnel mettait au centre de ses préoccupations uniquement la satisfaction des besoins et désirs du consommateur (la création d'une préférence pour le produit ou la marque qui le définit). Paradoxalement en ne prenant en compte que l’aspect " produit ", l’entreprise s’est éloignée de son client. Cet éloignement a été parallèlement accompagné par un ralentissement économique, une banalisation des produits et un accroissement des exigences des consommateurs combiné par une baisse logique de la fidélité. À force de se consacrer à l’amélioration de leurs produits et à leur fonctionnement interne, les entreprises avaient fini par perdre de vue la composante primordiale de leur fonds de commerce : leurs clients. C'est pourquoi, on assiste depuis près d’une décennie à un retour de " balancier "; les entreprises se tournent aujourd’hui avec attention vers leurs clients. Cette évolution est suite aux évolutions depuis une vingtaine d’années, des technologies de l’information et de la communication, au développement des services et du marketing " Business-to-Business ", l’idée d’un lien direct a émergé.

Ainsi, si le marketing classique faisait de la supériorité du produit, de la qualité de son positionnement et de son capital "marque", les éléments clés d'une fidélité prouvée par chaque ré-achat, le marketing " moderne " place désormais au cœur de l'analyse la notion d'échange et fait de la relation l'objet central de l'analyse. La relation globale avec le client devient un thème central des préoccupations managériales et académiques. L’orientation-marché procède ainsi de la culture de l’entreprise qui génère, de façon la plus effective et la plus efficiente, les comportements nécessaires à une création de valeur supérieure délivrée au client (Kohli et Jaworski 1990, Narver et Slater 1990), ou d’un ensemble de croyances qui placent les intérêts du client en premier (Deshpande, Farley et Webster 1993). La satisfaction du client devient dorénavant un processus continu, permanent, sujet à de perpétuelles améliorations, et ne concerne plus seulement les produits de l'entreprise mais la nature même de la relation.

Cette nouvelle gestion du marketing, se traduit par la création de nouvelles doctrines dont le marketing relationnel. D’un flux intermittent de contacts marchands avec le client, l’entreprise recherche le lien continu et pérenne dans le cadre d’un marketing relationnel (Dwyer, Schurr et Oh 1987, Sheth et Parvatiyar 1994, Reichheld 1996). Le client et sa conservation représentent une préoccupation marketing et un objectif stratégique.
 

I.2. Pas de marketing des services sans marketing relationnel

I.2.1. Le cadre conceptuel du marketing relationnel

Parmi les diverses définitions du marketing relationnel qui ont été données, on retiendra celle de Morgan et Hunt (1994) qui semble constituer une synthèse : " le marketing relationnel concerne toutes les activités dirigées vers l’établissement, le développement et le maintien avec succès d’échanges relationnels ". La compréhension du marketing relationnel nécessite, par conséquent, de distinguer la simple transaction qui " a un début distinct, une durée courte et une fin en relation avec des performances " et un échange relationnel " qui fait suite à des accords, qui a une durée plus longue, qui reflète un processus continu " (Dwyer, Schurr et Oh 1987).

De plus, de nombreuses recherches démontrent qu’il est moins coûteux de préserver une relation commerciale existante plutôt que d’acquérir un nouveau client (Reichheld, 1993). On comprend mieux alors pourquoi les entreprises cherchent de plus en plus à pérenniser cette relation sur le long terme dans le but d’évincer tous risques de manque à gagner futur.

L’approche relationnelle définie par Morgan et Hunt (1994) devient une donnée stratégique essentielle qui s’adapte parfaitement au marketing des services où l’échange relationnel prédomine. Cette généralisation au sein des entreprises fournissant des services s’est en grande part accentuée par la globalisation des marchés et la concurrence accrue. La création d’une relation et l’amélioration de sa qualité sont donc devenues importantes dans un contexte relationnel.
 

I.2.2. Les apports transactionnels et relationnels de l’échange

L’approche relationnelle liée à la notion d’échange  a accaparé l’attention de plusieurs chercheurs et praticiens depuis maintenant quelques années (Barnes, 1997 ; Bendapudi et Berry, 1997 ; Benamour et Prim, 2000). Les résultats des recherches démontrent qu’être relationnel n’est pas nécessairement un objectif puisque certains clients ne tiennent pas à avoir une approche relationnelle, mais sont plutôt orientés vers d’autres critères tels que le prix (Jackson, 1985). Cependant, il est beaucoup plus réaliste d’être transactionnel dans un contexte relationnel que relationnel dans un contexte transactionnel, notamment dans le secteur bancaire que nous présenterons par la suite (Perrien et Ricard, 1994)

Suite à cette approche relationnelle versus transactionnelle, Barnes (1997) a mené une étude empirique dans le secteur financier afin de valider ces différences d’attitudes entre les individus. Pour ce faire, il a demandé à la clientèle de plusieurs centres financiers " comment elle concevait une bonne relation avec sa banque (conseiller financier) ". Les résultats obtenus ont validé l’hypothèse de départ, puisque certains clients ont répondu " je ne les appelle pas et ils ne m’appellent pas ". Ce type de réponse montre toute l’importance de bien segmenter la clientèle pour éviter d’entretenir un échange relationnel (basé sur l’affectif, sur des interactions répétées, avec une orientation à long terme) avec des individus qui recherchent uniquement un échange transactionnel (des opérations ponctuelles où seul le facteur " prix " compte ou bien des achats répétés mais indépendants les uns des autres).

Ces brefs constats ont des implications théoriques parce qu’ils permettent de clarifier le concept d’approche relationnel et également des implications managériales pertinentes puisqu’ils nous amènent à préciser les variables que le gestionnaire peut manipuler pour être relationnel selon sa taille. Désormais, les entreprises fournissant des services vont devoir savoir identifier les attentes du consommateur en terme marketing mais également en terme de relation afin de mieux allouer les ressources financières du vendeur et de l’entreprise.

I.2.3. Les facteurs clés du maintien des échanges relationnels

De manière plus générale, " le marketing relationnel doit exprimer l’objectif de l’entreprise envers le client, à savoir l’initiation et le maintien d’une relation d’affaires, et ceci, de façon crédible " (Ivens, Mayrhofer, 2003). Dans cette optique, une forme de contrat implicite ou explicite va s’établir entre l’entreprise et le client où différentes normes s’entrecroisent. La réunion de ces normes contractuelles définies par Macneil (1980) joue un rôle majeur dans le prolongement des échanges relationnels.

Normes liées au relationnel

L’intégrité du rôle (l’orientation à long terme) qui précise que dès les prémices de la relation et tout au long de cette dernière, l’entreprise doit prouver envers son client sa motivation de maintenir l’échange. Cette notion est caractérisée par la confiance établie sur le long terme entre le client et l’entreprise. Cette norme peut entraîner une dégradation ou une rupture de la relation, lorsqu’ils sont négativement évalués par le client.

La réciprocité s’inscrit également dans une orientation à long terme. Au préalable assimilée comme une norme plutôt transactionnelle (Macneil, 1980 ; Ford, 1980 ; Kaufman et Stern, 1988) parce qu’elle représentait une idée du partage du surplus, elle est devenue au cours du temps une des composantes contractuelles de l’approche relationnelle, se caractérisant par une forme de reconnaissance et de récompense de la fidélité.

La solidarité représente " les attentes réciproques de chaque partie à l’échange que l’autre partie place dans la relation et dans son partenaire " (Heide et John, 1992). Cette norme est perçue par le client comme un soutient dans les moments difficiles.

La flexibilitédésigne " les attentes bilatérales de la volonté de l’autre partie de s’adapter et d’opérer des ajustements au fur et à mesure de l’évolution de l’environnement " (Heide et John, 1992).

La communication témoigne toute l’importance d’être transparent dans l’information que l’on fournit au client. Cette norme est primordiale à respecter pour ne pas risquer de démanteler la relation établie entre les deux parties.

Normes liées au transactionnel

La réalisation des promesses indique les conditions auxquelles l’entreprise s’est engagée à réaliser les opérations auprès de ses clients. Le non-respect d’une promesse pourra entraîner une rupture de l’échange.

La réparation prouve qu’il est primordial de corriger les défaillances sur un produit ou un service pour ne pas que notre client se dirige vers la concurrence. Dans le cadre de relations de long terme, rares sont les cas où il n'y a jamais eu de problème ; et une juste réparation est attendue, faute de quoi la confiance est détruite.

L’usage modéré du pouvoir préconise à l’entreprise de ne pas faire trop pression sur le client dans ses choix afin d’éviter un climat d’échange difficile. Par exemple, dans le secteur bancaire, le client apprécie de disposer d’un certain pouvoir, notamment de négociation, face au banquier.

Ces différentes normes ont une influence plus ou moins modérée sur le maintien de la relation à long terme. L’examen de la littérature et des résultats amène à considérer que les normes d’intégrité de rôle, de solidarité, de réciprocité et de flexibilité sont vitales pour le maintien de la relation de long terme, la norme communication constituant pour sa part un ciment permettant l’établissement de relations viables et efficaces. Les normes relationnelles vont traduire plus la spécificité des relations de long terme donc elles seront plus fortement reliées à la décision de rupture que les normes transactionnelles.

Au vu de ces premières pistes de réflexions on comprend pourquoi les entreprises fournisseurs de services donnent de l’importance au marketing relationnel mais qu’en est-il vraiment dans le secteur bancaire ?
 

I.3. Pertinence du marketing relationnel dans le secteur bancaire

I.3.1. Le marché bancaire aujourd’hui

L’industrie financière est en pleine mutation depuis quelques années suite à l’arrivée massive de nouvelles technologies et des déréglementations qui s’effectuent à l’échelle mondiale (augmentation du nombre de concurrents). Malgré le fort attachement des français à leur banque par rapport aux anglophones, la France n’est pas épargnée, d’une part parce qu’elle est surbancarisée, et d’autre part à cause du bon avancement de l’ouverture européenne.

I.3.2. L’instabilité de la clientèle

Les clients suivent les mêmes tendances car mieux informés, leurs exigences s’accroissent et surtout, ils deviennent moins fidèles qu’auparavant. Une étude anglaise a démontré qu’un client particulier sur deux changerait de banque afin de profiter d’une offre commerciale plus alléchante chez un concurrent étranger. L’inquiétude des banques est justifiée puisque certains établissements étrangers ont déjà débuté leur implantation en Europe (plus particulièrement en Grande Bretagne qui leur sert de zone probatoire tout en profitant des avantages de l’Union Européenne) via le canal de la distribution à distance qui leur permet ainsi de s’affranchir des difficultés d’une implantation physique.

Ainsi, dans ce marché où la concurrence est exacerbée, l’assurance de la fidélité des clients devient la priorité de succès des banques. Le marketing a un rôle fondamental à jouer en orientant les institutions vers des choix pertinents pour l’avenir et en contribuant à l’organisation de structures commerciales permettant de gérer convenablement l’ensemble des forces de la distribution (marketing multi-canal). Le centre des préoccupations des spécialistes en marketing bancaire sera également de réduire l’infidélité de la clientèle par l’intermédiaire, entre autres, du marketing relationnel.

Le marketing relationnel bancaire n’est pas une panacée mais il va permettre de formuler des recommandations pour réduire ces aléas. Le résultat de ces recherches est présenté dans la revue littéraire ci-dessous.


Revue littéraire sur le marketing relationnel bancaire
 

Ces dernières années, les études sur le comportement des clients de services financiers se multiplient considérablement. Ces recherches sont renforcées par l’utilisation d’enquêtes et de sondages qui ont pour finalité de mieux cerner le profil et les opinions des consommateurs. Malgré les conclusions qui en découlent, ces dernières restent pour la plupart encore très idéologiques. C’est pourquoi, certains auteurs (Ganesh, 2000 ; Crié, 2001 ; Ricard et Perrien, 2001) ont entrepris de tester et valider de manière empirique ces différents résultats en y apportant de nouveaux éléments d’étude.
 

II.1. Client Bancaire Commercial, une cible riche d’enseignements

Les premières études sur le sujet ont caractérisé la différence qui existe entre un client bancaire commercial et un client bancaire particulier, c’est-à-dire les relations de la banque avec sa clientèle en B to B et en B to C. Selon Perrien et McTavish (1994), la décision d’un client organisationnel d’utiliser un service financier est généralement davantage basée sur une évolution rationnelle et objective.

En conséquence, la littérature récente s’est principalement focalisée sur les enseignements retirés des relations banque / clientèle professionnelle étant donné la difficulté à appréhender cette dernière qui semble plus sujette à la versatilité.
 

II.2. Marketing défensif, noyau du marketing bancaire

II.2.1. L’objectif de la pratique d’un marketing défensif

Les chercheurs comme les praticiens s'intéressent au marketing défensif, c’est-à-dire à un marketing orienté davantage vers la fidélisation et la rétention de clientèle que vers la conquête de nouveaux clients (Reichheld et Sasser 1990, Reichheld 1993, Jones et Sasser 1995, Rust et Zahoric 1993, Gronroos 1994, Zeithaml, Berry et Parasuraman 1996, Hennig-Thurau et Klee 1997). Cette orientation défensive s’explique à travers la double nécessité de réduction des coûts marketing et de maintien des parts de marché dans un environnement souvent saturé par une offre abondante et diversifiée.

Comme support à cette nouvelle approche, une littérature s'est développée autour de la notion de relation, qu'elle provienne des travaux sur les services, du marketing industriel, ou de certains points de vue économiques tels que les coûts de transactions. La notion de life-time value devient ainsi l'étalon de mesure et l'exploitation du cycle de vie du client l'élément structurant des programmes d'action. D'un certain point de vue, par ces idées et ces concepts, on peut penser que l'offre-produit est devenue moins importante, moins déterminante, en particulier dans le processus de construction de la relation.
 

II.2.2. Le centre névralgique des banques : la fidélisation

Le concept de " fidélité à l’entreprise " représente la préoccupation majeure des spécialistes en marketing bancaire. Il est démontré qu’un client fidèle qui achète sur une longue période de temps, est moins influencé par les prix (Keaveney, 1995 ; O’Brien et Jones, 1995) et en parle positivement à son entourage (bouche à oreille positif). Partant de cette hypothèse, les dirigeants des institutions financières ont intérêt à connaître les facteurs qui influencent le niveau de fidélité de leurs clients afin d’appliquer les stratégies nécessaires au développement et au maintien de relations solides (Bergeron, Ricard et Perrien, 2001). La fidélité notamment d’un client commercial, réside en quatre points : la confiance de l’entreprise envers son institution financière, la culture relationnelle instaurée par la banque, le niveau concurrentiel de l’organisation et la qualité de la communication entre les deux parties. De cette façon, pour répondre à ces différents points, le conseiller financier aura un rôle prédominant.
 

II.3. Maintien de la relation, les acteurs qui y contribuent

II.3.1. Les bénéfices issus du maintien de la relation, le point de vue du client

La littérature dans le maintien de la relation s’est souvent placée au niveau de l’entreprise plutôt que du point de vue du client. Pour Gwinner, Gremler et Bitner (1998), les bénéfices d’une relation durable résident en trois formes. Tout d’abord, selon le niveau d’importance au yeux du client, les bénéfices psychologiques basées plus sur la confiance de son conseiller financier. Ce type d’attente nécessite du temps dans sa construction et dans son développement. Ensuite, les bénéfices associés au social où le client s’attend à ce qu’une certaine forme d’amitié se créé avec son conseiller financier. Ce type de bénéfice relationnel nécessite un niveau élevé de contact interpersonnel entre clients et conseillers financiers. Enfin, le dernier bénéfice attendu est l’adaptation c’est-à-dire toutes les actions individuelles qu’entreprend l’institution financière pour s’adapter aux besoins de chaque client. Celui-ci perçoit alors cette stratégie de sur-mesure comme un traitement préférentiel.

II.3.2. Les éléments motivants le client à maintenir la relation

Bendapudi et Berry (1997) ont également consacré leur recherche aux éléments motivant les clients à maintenir une relation avec leur fournisseur de services. Les auteurs se focalisent sur la distinction entre relation voulue/forcée et niveau de dévouement à la relation élevée/faible. Celui-ci est issu d'un certain niveau de confiance et de dépendance (lorsque l'hypothèse d'un éventuel comportement opportuniste est éliminée). Les auteurs tiennent également compte de certaines caractéristiques externes (niveau de contraintes du client) pour expliquer l'attitude du consommateur vis-à-vis de la relation. Cependant, Bendapudi et Berry (1997) croisent cette variable avec le niveau de dévouement du client. Lorsqu'un client est "dévoué" à une relation, il est moins enclin à rechercher d'autres alternatives et moins sensible aux offres des concurrents. Nous pouvons alors supposer que les clients les plus dévoués sont relationnels tandis que les autres ont plutôt tendance à être transactionnels.

II.3.3. La qualité de la relation, indicateur prédominant du maintien de la relation

Les relations vendeurs-acheteurs et leurs rôles en marketing sont ainsi devenus des sujets très débattus dans la littérature (Boles, Johnson, Barksdale, 2000). En 1994, Morgan et Hunt ont montré toute l’importance de la création de la relation et l’amélioration de sa qualité dans un contexte relationnel. La notion de qualité de la relation est définie comme un construit multidimensionnel composé de dimensions distinctes et interreliées (confiance, coopération, conflit, proximité des partenaires dans la relation, stabilité de la relation et enfin satisfaction de la relation). En général, plus les interactions sont fréquentes entre le conseiller financier et le client, plus la qualité de la relation augmente (hypothèse où le client est du type relationnel et non transactionnel).

II.3.4. Le conseiller financier, accompagnateur de ce maintien de la relation

Les banques qui instaurent une culture relationnelle recherchent pour la plupart, des relations personnalisées avec leurs clients, qui se situent dans une perspective à long terme (Perrien, Filiatrault et Ricard, 1992). Le rôle du conseiller financier, " vitrine " de la banque, va être de construire une relation de confiance sur une longue période. Cette constatation n’est pas pour autant aussi facile à réaliser dans la pratique. En premier lieu, pour que cette relation puisse exister, cela nécessite une réciprocité des deux parties. Comme nous avions pu le voir précédemment, une certaine clientèle n’est pas prédisposée à s’engager dans une relation sur le long terme (orientation transactionnelle). En second lieu, les banques souffrent d’un taux de rotation élevé des conseillers financiers empêchant inévitablement l’assurance d’un lien fort avec le client (Perrien, Filiatrault et Ricard, 1993). Cette mobilité du conseiller financier peut dans la durée agacer le client qui sera à son tour peut-être sujet à changer d’institution financière (impression qu’il n’est pas important pour la banque). On remarque tout l’intérêt pour une banque de fidéliser aussi bien en interne (conseillers financiers) qu’en externe (clients).

En revanche, Crosby, Evans et Cowles (1990) ne partagent pas cet avis concernant le rôle joué par le conseiller financier. Selon eux, il joue, notamment par son expertise, de façon modérée sur la qualité de la relation. Toutefois, Brand, Cronin et Routledge (1997) rejoignent l’idée de Perrien, Filiatrault et Ricard (1993) selon laquelle l’expertise de l’organisation financière donne de la crédibilité à cette dernière. Cette expertise influence à la fois la fidélité du client et la propension de ce dernier à effectuer des recommandations positives.

Malgré ces quelques polémiques sur le rôle joué par le conseiller financier, tous ces auteurs se rallient sur un point, la connaissance inadéquate des besoins et attentes des clients est une cause majeure d’insatisfaction. L'amélioration de la satisfaction client passe dorénavant en premier lieu par la connaissance du client. Par exemple en B to B, il sera primordial pour la banque de connaître du client en plus de son profil socio-démographique, des éléments propres à l’activité de ce dernier (son métier, ses problématiques, ses process, sa culture et son environnement). En effet, lorsqu'un client fait appel à une institution financière, il attend, au-delà de l'expertise technique, de la réactivité, de l'opérationnalité, une véritable implication de la part des conseillers financiers. Le relationnel est donc primordial car il est un élément contributif de la qualité de la prestation elle-même facteur de la satisfaction du client.
 

II.4. Connaître le client est devenu source de valeur ajoutée

Cette orientation de plus en plus vers une culture-client nécessite donc en interne, une implication totale de la part de l’entreprise. La littérature souligne l’importance de " connaître réellement son client " (Teas, 1988 ; Holmlund et Soren, 1996 ; Ricard et Perrien, 1999).

Ainsi la " connaissance du client " devient une composante clé du marketing relationnel (Smith et Barclay, 1997) puisque pour répondre aux besoins du client, il faut supposer que les entreprises le connaissent. C’est pourquoi, même si cette connaissance apparaît aujourd’hui comme un impératif de gestion, et ce, surtout dans le contexte d’échanges entre organisations (B to B), les recherches empiriques effectuées sur la connaissance du client demeurent quasi inexistantes.

En 2001, Ricard et Rosenthal définissent la connaissance comme le résultat d’une recherche d’informations pertinentes et suffisantes sur les constituants intrinsèques et extrinsèques du client ainsi que de son entreprise (lorsque l’analyse se situe dans un contexte commercial). Autrement dit, la connaissance du client correspond à une accumulation d’informations sur les caractéristiques internes et externes inhérentes au client, à son entreprise et à son propre environnement pouvant résulter d’une recherche d’informations. Malgré l'importance du concept de connaissance du client, ils se sont aperçus qu’il existait peu de recherches empiriques sur cette variable dans la littérature. L'objectif de l’étude consiste donc à voir de manière empirique comment les clients commerciaux perçoivent le niveau de connaissance que leur représentant possède et quels sont les éléments qui sont les plus importants à connaître selon eux.

Jusqu’à présent l’étude la plus développée pour mesurer la connaissance est celle de Ricard et Perrien (1999). Néanmoins, elle ne prend pas en considération tous les éléments d’information qui pourraient se retrouver dans la connaissance. En effet, les éléments d’informations à connaître sont liés au client en tant que gestionnaire (caractéristiques socio-démographiques ou économiques, ses attentes, ses perceptions), à l’entreprise du client (situation de l’entreprise et processus décisionnel) et à l’environnement de l’entreprise du client (situation concurrentielle et le dynamisme des entreprises de l’industrie).

Les premiers résultats de l’étude de Ricard et Rosenthal montrent que l’évaluation faite par les entreprises clients du niveau de connaissance du directeur de comptes est assez faible dans l’ensemble. En effet, les clients perçoivent que leurs directeurs de comptes les connaissent peu et que les éléments importants ne sont pas toujours bien connus selon les clients. Tous ces éléments seront vus lors de la formulations des recommandations managériales.
 

Conclusion générale de la revue littéraire

Les résultats obtenus des différentes études présentées succinctement vont permettre d'améliorer les connaissances sur les facteurs qui influencent la fidélité des clients commerciaux envers leurs banques et également les principes qui peuvent engendrer une rupture de la relation, et surtout, donner des pistes sur les éléments que le client aimerait que son conseiller financier connaisse à son propos. Les observations tirées de ces résultats sont intéressantes car elles apportent un côté pratique à la présente recherche. En effet, nous pouvons maintenant passer au troisième objectif de la présente étude : suggérer plusieurs implications stratégiques aux banques afin qu’elles puissent notamment fidéliser davantage leurs clients.


Discussion et implications managériales dans un contexte B to B
 

Il est important de noter que sans un engagement vigoureux et à long terme de la haute direction, la mise en œuvre et la réalisation des implications qui vont suivre restent inutiles. Par conséquent, les décisions devront se refléter dans les objectifs et la culture de la banque. Parmi les implications managériales proposées, certaines affectent directement la structure organisationnelle de l’institution financière. D'autres ne demandent qu'un support et un contrôle des activités sur le comportement du personnel en contact avec les entreprises. Quoiqu’il en soit, voici quelques recommandations stratégiques nécessaires pour établir un climat de confiance avec des clients commerciaux, pour instaurer une culture relationnelle au sein de l’institution financière, pour améliorer les perceptions des clients face au niveau concurrentiel de la banque, pour améliorer la qualité des communications. Toutes ces implications n’ont qu’une seule finalité, à savoir, mieux appréhender la clientèle entreprise.
 

III.1. Profil de l’entreprise cliente

III.1.1. La situation financière et la taille de l’entreprise cliente

En premier lieu, les organisations de grande taille utilisent habituellement plus d’une banque pour répondre à leurs nombreux besoins. Il est donc envisageable que la taille des entreprises influence leur niveau de fidélité. L'étude de Neilsen, Tayler et Brown (1994) démontre que la santé financière d’une entreprise influence la durée de sa relation avec sa banque. Plus l'entreprise est en difficulté financière, plus son intérêt pour une relation à long terme augmente puisqu'elle peut ainsi diminuer son niveau d'incertitude (Ricard, 1995). La première implication managériale est plutôt une constatation, si le client se sent suivi par sa banque dans les moments difficiles, il aura tendance à en parler positivement auprès de son entourage.

III.1.2. Les caractéristiques socio-démographiques du décideur de l’entreprise cliente

D’autre part, certaines caractéristiques socio-démographiques propres aux clients sont susceptibles d’influencer leur niveau de fidélité (l’âge, la langue maternelle et le niveau de scolarité des décideurs).

Les résultats de l’étude de Massad (1996), révèlent que la propension à prendre des risques chez les individus est inversement proportionnelle à l’âge. En se basant sur ces recherches, nous pouvons supposer que les décideurs âgés sont plus réticents à changer de banque que les clients plus jeunes.

Les résultats de l’étude de Bergeron (1997) révèlent que la langue maternelle et le niveau de scolarité d’un décideur au niveau commercial influencent de manière significative le degré de fidélité de son entreprise envers sa banque. Selon cet auteur, les clients anglophones (versus francophones) et les clients scolarisés sont moins fidèles à leurs institutions financières.

Ainsi Bergeron, Ricard et Perrien (2001) dans leur étude sur les facteurs qui influencent le niveau de fidélité des clients commerciaux ont validé les recherches antérieures sur le marché canadien à Montréal. Le choix de ce marché n’est pas anodin, puisqu’il est très concurrentiel, l’offre bancaire est très homogène et deux langues maternelles y cohabitent (anglophones et francophones).

Les principaux résultats de recherches sont les suivants :

La langue maternelle du répondant différencie également de façon très significative les deux groupes (Fidèles / infidèles). En effet, 82% des répondants anglophones sont infidèles à leurs banques alors que ce pourcentage ne s'élève qu'à 37% pour les clients de langue française.

La scolarité du décideur exerce un impact important et significatif sur le niveau de fidélité de son entreprise (81% des répondants possédant un diplôme d'études secondaires sont fidèles à leurs banques, à l'inverse, 60% des bacheliers sont infidèles). Ces résultats s’expliquent peut-être par le fait que les bacheliers sont habituellement mieux informés et donc, plus exigeants envers l'offre des banques.

Comme la première implication, ces renseignements sur l’âge, la langue maternelle, et le niveau de scolarité ne sont que des indications sur comment mieux appréhender la cible sachant qu’à la différence d’un client particulier, le décideur de l’entreprise n’a pas toujours le point " pouvoir " des choix.

III.1.3. La volonté démontrée du client à s’engager dans la relation

Sheaves et Barnes (1996) proposent une segmentation des clients selon leurs attitudes face à la relation. Les auteurs estiment qu'une relation ne peut commencer que si les deux parties concernées sont intéressées par son développement, ce qui implique une volonté du client à s'engager dans une relation avec l'entreprise. Sheaves et Barnes (1996) ajoutent que "la perception du consommateur de l'existence d'une relation dépasse, dans la plupart des cas, le contrôle de l'entreprise". Elle peut être reliée à la personnalité du client et à ce qu'il recherche. Un consommateur peut être en quête d'intimité avec son interlocuteur tandis qu'un autre peut éviter toute forme d'intimité avec son partenaire d'échange. L'entreprise ne doit donc pas perdre son temps, déployer des efforts pour entreprendre une stratégie de type relationnel si le consommateur ne perçoit pas l'existence d'une relation.
 

III.2. Développer et maintenir un climat de confiance

III.2.1. L’assistance humaine

Au cours des dernières années, l’évolution du marché financier tend à dévaloriser le contact humain au profit de la rentabilité. En effet, de nombreuses banques privilégient les guichets automatiques et autres services électroniques au détriment du contact humain avec le conseiller financier. Même si ces moyens sont en général bien perçus par la client (par exemple, gain de temps), ils sont un frein direct au développement et au maintien du climat de confiance. Comme nous l’avons vu précédemment, une confiance ne peut se réaliser que si le client perçoit que son conseiller financier le connaît bien (Bergeron, 1997). Ainsi, si les banques souhaitent utiliser les nouvelles technologies, elles auraient avantage à développer avec ces dernières un système pour connaître les objectifs, les besoins et les attentes de leur client commerciaux.

III.2.2. La décentralisation du pouvoir décisionnel en faveur des conseillers financiers

Une autre recommandation consiste à décentraliser le pouvoir décisionnel en faveur des conseillers financiers. " Ceci aura pour effet d’augmenter la crédibilité des conseillers et d’enrichir la relation. Pour l'instant, les banques ont tendance à responsabiliser leur personnel pour le maintien des relations avec les entreprises sans pour autant leur donner l'autorité nécessaire pour assurer un tel rôle " (Perrien, Filiatrault et Ricard, 1993).

Par conséquent, afin que le conseiller financier assume pleinement son rôle dans le développement et le maintien de la relation, il devient nécessaire de diminuer et simplifier sa charge de travail. Bâtir une relation de confiance avec une entreprise prend du temps. Plus un conseiller passe de temps avec un client, plus il risque de développer une relation solide avec lui. Pour l’instant, le travail administratif prend encore trop de temps aux conseillers et cela limite leurs capacités à entretenir des relations solides avec leurs clients commerciaux (Blanchard et al., 2000).
 
 

III.3. Développer et solidifier une culture relationnelle

Les relations commerciales durables avec les clients représentent un enjeu essentiel pour les entreprises (Webster, 1992). De ce fait, la recherche en marketing en Business-to-Business, a consacré de nombreux travaux à l’étude de la création et du développement des relations de long terme (Dwyer, Schurr et Oh, 1987 ; Sheth et Parvatyar, 1995). En se plaçant au niveau de l'entreprise on comprend mieux ce que peut présenter une rupture de relation avec un client se caractérisant par un manque à gagner futur (Reichheld, 1993). L'analyse des ruptures subies est donc, pour une entreprise, particulièrement pertinente.

III.3.1. Limiter le taux de roulement des conseillers financiers

Afin d’assurer la pérennité de la culture relationnelle, il importe donc de limiter le taux de roulement chez les conseillers financiers. Perrien et McTavish (1994) vont même jusqu’à suggérer aux banques de mettre sur pied une équipe de personnes en charge de la relation, au lieu d’assigner un seul individu, afin de ne pas compromettre les relations à long terme avec les entreprises. Cette recommandation est particulièrement importante car comme le souligne Mehta, Maniam et Mehta (1999), le conseiller financier et la personnalisation du service constituent des éléments déterminants dans l’élaboration d’une relation à long terme avec les clients de services financiers.

III.3.2. Remanier les critères d’évaluation du conseiller financier

D’autre part, les critères d’évaluation peuvent influencer les comportements des conseillers financiers. En effet, si le conseiller est évalué en fonction des ventes de placement, il se focalisera sur cet objectif en délaissant l’aspect relationnel. Par conséquent, les banques ne doivent plus évaluer leurs conseillers financiers uniquement en fonction du nombre de produits vendus, mais en y incluant les notions de satisfaction du client et de taux de rétention.

III.3.3. Gérer les mauvaises expériences du client

Enfin pour que la culture relationnelle soit durable, il est conseiller aux institutions financières d’établir un système de gestion des plaintes efficace et rapide. Le client se sentira " rassuré " et il sera moins enclin à la versatilité.
 

III.4. Améliorer les perceptions des clients

III.4.1. Face au niveau de connaissance des conseillers financiers

Le tableau ci-dessous, présente la synthèse des résultats saillants de l’étude de Ricard et Rosenthal (2001).
 
 

Questions de recherche Résultats
Question 1 :

Quelle est l'évaluation faite par les entreprises-clientes du niveau de connaissance (relatif à chacune des catégories : client en tant que gestionnaire, entreprise, processus décisionnel, environnement de l'entreprise) que possède le directeur de comptes de ses clients?

 

Élément le plus connu : situation financière

Éléments les moins connus : les politiques de l'entreprise, ses stratégies, sa flexibilité face aux changements et les éléments liés à l'environnement.
 

Variables ayant un impact sur le niveau de connaissance perçu du directeur de comptes :

Sexe du responsable des négociations bancaires : évaluation plus faible des hommes quant à la connaissance de la performance financière générale de l'industrie.

Chiffre d'affaires de l'entreprise : évaluation plus faible des entreprises ayant un chiffre d'affaires compris entre $ 200,000 et moins de $ 1,000,000 quant à la connaissance de tous les éléments d'information.

Question 2 :

Quelle est l'importance accordée par les entreprises clientes des éléments d'information à connaître?

 

Eléments les plus importants :

Catégorie Gestionnaire : attentes en matières de services financiers et projets du gestionnaire pour l'entreprise

Catégorie Entreprise : produits et services, méthodes comptables, flexibilité de l'entreprise face aux changements, situation financière, contraintes.

Catégorie Processus décisionnel : personnes qui prennent les décisions au sein de l'entreprise.

Catégorie Besoins : besoins présents et futurs (tous).

Catégorie Environnement : tous les éléments aussi importants les uns que les autres.

(Ricard et Rosenthal (2001), " Connaître ses clients … La perception des clients ", Actes du Congrès (Deauville), vol. 17, p 33)


La matrice ci-dessous permet d'avoir une meilleure idée des éléments les mieux et les moins connus que Ricard et Rosenthal situent selon leur degré d'importance aux yeux des entreprises. Dans cette matrice, les éléments sont disposés selon le score que les entreprises clientes leur ont attribué tant du point de vue de la connaissance que du point de vue de l'importance accordée. Il est intéressant de constater qu'il y a des éléments qui sont très peu connus par le directeur de comptes alors qu'ils le devraient puisqu'ils sont jugés importants par les entreprises. Il est possible de remarquer que le processus décisionnel représente la catégorie la moins importante pour les entreprises et les besoins, la catégorie la plus importante, bien que cette dernière reste peu connue.
 


Connaissance et importance des éléments d’information

(Ricard et Rosenthal (2001), " Connaître ses clients … La perception des clients ", Actes du Congrès (Deauville), vol. 17, p 34)


Cette figure est intéressante dans la mesure où elle permet au banquier d'identifier les éléments prioritaires, c'est-à-dire ceux sur lesquels il devrait se concentrer davantage afin d'acquérir une meilleure connaissance, puisqu'ils sont importants pour les entreprises. Comme éléments prioritaires, notons les contraintes de l'entreprise, la flexibilité de l'entreprise, les stratégies de l'entreprise et les grandes catégories telles que les besoins, le gestionnaire, l'entreprise et l'environnement qui, selon la perception des entreprises clientes, demeurent peu connus. En sachant ce qui, pour l'entreprise cliente, est important à connaître, le banquier peut dès lors orienter ses efforts et ainsi obtenir une plus grande satisfaction de son client.
 

III.4.2. Face au niveau concurrentiel de l’institution financière

Avec l’essor des nouvelles technologies, les clients ont la possibilité d’avoir très rapidement les informations sur les prix pratiqués par la concurrence sur tel ou tel service. Ainsi, il devient primordial pour une banque de se prémunir en élaborant un système d’analyse en interne de la concurrence permettant d’ajuster rapidement sa stratégie face aux données recueillies. Ce dernier devrait contenir les informations sur les objectifs des concurrents, leurs produits et services, leurs taux d’intérêts, leurs frais de service et leurs promotions. Même si la confiance est élevée envers leur institution financière, le dépassement par un concurrent pourra avoir un effet néfaste sur la durée de la relation. L'étude de Zineldin (1995), réalisée dans le secteur bancaire commercial, démontre que la performance de l’institution financière, au niveau des taux d'intérêts et des différentes formes de crédit, influence considérablement le développement d'une relation. Ces résultats concordent avec les propos de Jackson (1985) et de Neilsen, Tayler, et Brown (1994) qui stipulent que plusieurs entreprises choisissent leurs banques en ne considérant que les meilleures conditions financières.
 

III.5. Améliorer la qualité du système de communication

Les recommandations concernant la qualité du système de communication sont plus liés à l’offre de services qu’au marketing relationnel. Toutefois, ils sont pertinents à étudier puisqu’ils permettent d’élaborer une partie des recommandations qui ont été énoncées précédemment.

III.5.1. En interne

La première recommandation face aux communications concerne les clients internes des banques, c’est-à-dire, le personnel. Selon Bruhn (2000), la qualité des communications internes dans les institutions financières est fortement corrélée avec la qualité des communications externes avec les clients. Par surcroît, tous les employés doivent avoir droit à des informations rapides et précises sur les produits, les services, les promotions et aussi, sur les clients de leur propre banque. Un système de communication interne efficace permettrait également de créer un réseau d'information reliant les conseillers financiers à la haute direction, ainsi qu’aux différentes filiales de la banque. Ce réseau bidirectionnel pourrait notamment améliorer l’identification des forces et des faiblesses des procédures et des politiques de l’institution financière.

III.5.2. En externe

Les banques doivent également développer un réseau de communication marketing externe afin d’annoncer les promotions et les nouveaux produits et services offerts. Selon Thornton et White (2000), la majorité des clients apprécie l’arrivée des services financiers électroniques, mais a tout de même l’intention de visiter les succursales physiques de manière régulière. Par conséquent, les banques devront non seulement se servir des outils de promotion traditionnels en succursale, mais aussi communiquer leurs offres sur Internet et envoyer régulièrement des informations pertinentes à des listes de courriers électroniques ciblées.
 

Conclusion générale sur les implications managériales en B to B

En analysant ces différentes implications managériales, on remarque que la fidélité des entreprises est grandement influencée par une combinaison judicieuse des stratégies de la banque (par exemple, qualité du service, prix, communications, etc.). Comme le conclut Blanchard (2000), l’augmentation de la fidélité des clients est un enjeu stratégique qui a un impact à tous les niveaux de l'organisation. Les institutions financières qui appliqueront avec succès les implications managériales citées plus tôt profiteront certainement d'un avantage concurrentiel difficile à imiter.

Ces implications managériales découlent des études empiriques qui ont été réalisées dans un contexte B to B mais est-ce que ces dernières sont applicables au marché des particuliers ?


Discussion et implications managériales dans un contexte B to C
 

Aujourd’hui, comme on a pu le constater précédemment, la création et la maintenance de la fidélité client sont devenues incontournables dans la stratégie des entreprises fournissant des services. Une récente étude démontre que les clients ont des différences dans leurs valeurs vis-à-vis de l’entreprise, et par conséquent, la rétention client et les efforts de construction de la fidélité ne sont pas nécessairement destinés à l’intégralité des clients de l’entreprise. Ce qui donne ce sentiment, c’est la nécessité croissante des entreprises de bien  " comprendre " leur base clients. Cependant, dans la littérature récente, cette connaissance reste encore limitée pour les entreprises surtout dans un contexte B to C.
 

IV.1. Objectifs de l’étude de Ganesh, Arnolds et Reynolds (2000)

D’après les statistiques, la moitié des clients risque d’être perdue en cinq ans et cette infidélité nuit directement à la rentabilité de l’entreprise (Reichheld & Teal, 1996). D’autre part, les études montrent que la relation sur le long terme entre le client et l’entreprise, devient moins coûteuse parce que l’entreprise connaît mieux ses attentes et les coûts des services diminuent également.

Ainsi Ganesh, Arnold et Reynolds (2000) ont décidé de réaliser une étude dans le but de faire comprendre aux entreprises l’impact des différences de comportements de leurs clients particuliers sur la rentabilité et la viabilité de leur activité de service. En effet, il est prouvé que ce sont les clients fidèles qui contribuent le plus au chiffre d’affaires de l’entreprise car plus ils consomment, plus l’entreprise propose des prix compétitifs et plus elle réduit ses coûts de fonctionnement. La conclusion de leur recherche valide les éléments précédents, tous les clients ne pourront pas faire l’objet d’une même stratégie de rétention et de fidélisation. Leurs travaux ont permis d’identifier les différences de comportement et d’attitude au sein de la base clients de l’entreprise par la détermination de segments de clientèle (les " Stayers " c’est-à-dire les clients qui n’ont pas changé d’entreprise de service, les " Dissatisfied Switchers " représentant les clients qui ont changé d’entreprise de service pour des raisons d’insatisfaction et enfin les " Satisfied Switchers "  qui ont changé d’entreprise de service pour d’autres raisons que l’insatisfaction).
 

IV.2. Implications managériales (étude de Ganesh, Arnolds et Reynolds (2000))

Cette étude permet d’obtenir des éléments de réponse sur la manière de mieux comprendre la base clients d’un organisme financier. Les résultats confirment l’hypothèse générale, à savoir, que des différences non-aléatoire de comportements existent dans les bases clients des institutions financières. Spécifiquement, ces disparités sont inhérentes à la segmentation effectuée par ces trois auteurs.
 

IV.2.1. L’analyse des facteurs qui influencent le comportement du consommateur

Concernant la satisfaction générale

Les résultats de l’étude témoignent des différences significatives qu’ils existent entre chacune des catégories. Tout d’abord , les " Dissatisfied Switchers " sont significativement plus satisfaits des services bancaires que les deux autres catégories. Cela peut s’expliquer par le fait qu’ils ont choisi d’appartenir à cette nouvelle institution financière. Ensuite, les " Stayers ", qui entretiennent depuis longtemps une relation de confiance avec leur conseiller de clientèle. Et, enfin les moins satisfaits sont les " Satisfied Switchers ". Ce groupe reste très difficile à appréhender pour les organismes financiers puisqu’ils sont en mouvance continuelle (aucun lien d’attache aux caractéristiques de la banque).

Concernant l’implication

Concernant l’implication, deux facteurs sont significatifs et discriminants. Tout d’abord, selon leur ordre d’importance :

L’implication personnelle qui représente une implication durable et un intérêt continu pour une catégorie de produits ou services. Elle est donc indépendante du contexte d’achat. Bien que durable, plusieurs mécanismes psychologiques influencent le niveau d’implication, comme la familiarité (connaissance de l’entreprise). Ainsi, les " Stayers " ne possèdent qu’une expérience. Par conséquent, ils ont un degré de familiarité supérieur et une attitude favorable envers l’entreprise et ses produits.

L’implication d’achat (coût, investissement, effort…). Les " Stayers " n’ont pas la même implication d’achat que les " Switchers ", c’est pourquoi l’étude suppose uniquement une différence entre les deux types de " Switchers ". Les " Dissatisfied Switchers " auront un niveau d’implication d’achat plus fort car ils ne veulent pas subir un second échec.

Concernant la fidélité

Les " Dissatisfied Switchers " sont plus à même de s’engager dans des comportements de fidélité active (de nature versatile si insatisfait). En revanche , les " Stayers " sont plus favorables à montrer des comportements de fidélité passive (peu enclin au changement). Les " Switchers Satisfaits " se trouvent entre les 2 autres groupes en terme de comportements actifs ou passifs de fidélité.

IV.2.2. L’intérêt de cette segmentation pour un organisme

Du point de vue de la rétention, à part les " Satisfied Switchers ", les deux autres catégories semblent composer une clientèle intéressante pour une institution financière. Bien évidemment, ces dernières doivent être traitées correctement.

Tout d’abord, la catégorie des " Stayers " qui part leur basse propension à la versatilité est primordiale à conserver. Toutefois, ce groupe ne s’engage que faiblement envers sa banque (attitude passive) donc malgré une fidélité de long terme, il semble nécessaire de ne pas trop dépenser dans les efforts de conservation de ce type de client.

D’autre part, concernant les " dissatisfied Switchers ", les résultats obtenus réclament une stratégie différente. Le fort niveau d’implication de ce groupe démontre un engagement élevé envers la nouvelle banque. Il devient donc primordial pour un organisme financier de ne pas le décevoir sinon il risque de réitérer son expérience passée (versatilité pour cause d’insatisfaction).
 

Conclusion générale sur les implications managériales en B to C

En analysant cette typologie on remarque qu’elle reste relativement simpliste et l’homogénéité interne de ces groupes peut être remise en cause. Cette catégorisation est une première étape pour que les entreprises comprennent l’impact d’une segmentation ayant pour finalité d’augmenter la rentabilité et la viabilité de leur activité de service. Il sera par conséquent, nécessaire que la banque évalue la valeur de vie de chaque groupe pour en déduire si l’investissement stratégique est pertinent.

Les institutions financières devront également se poser les questions suivantes pour comprendre réellement les motivations de leur clientèle :

Sont-ils fidèles parce qu’ils n’ont pas le choix ?

Parce qu’ils sont satisfaits ?

Parce qu’ils hésitent à changer d’institution financière ?

Ou sont-ils de nature versatile ?


Conclusion, Limites et voies de recherche
 

Avant de conclure ce mémoire, il importe d’en présenter les limites.

Elles résident principalement dans les sources qui ont été utilisées pour constituer ce mémoire. Ce dernier est basé sur le travail effectué par les praticiens et chercheurs qui ont tous, sans exception, émis des limites à leurs études. Par exemple, Ricard et Rosenthal (2001) ont dénigré la qualité de leur échantillonnage (trop restreint), Benamour et Prim (2000) ont quant à eux, jugé le nombre d’items utilisé pour leur échelle de mesure trop approximatif (nécessite des adaptations notamment dans les traductions de l’échelle à l’international), d’autres sont liées au faible taux de réponses, … Ces limites montrent qu’il faut rester très prudent dans l’interprétation des résultats. Toutes les réponses qui ont été émises dans ce mémoire sont donc plus des pistes de réflexion qui nécessitent d’autres analyses confirmatoires.

Il est important également de mentionner une limite au niveau théorique. En effet, peu de recherches empiriques sur la connaissance du client ont été réalisées en B to C. La plupart des écrits restent conceptuels et dans une large majorité destinée plus à une clientèle entreprise. Dès lors, il semble intéressant d’approfondir les informations obtenues en B to B et aussi conceptualiser et étudier de manière empirique ces dernières dans un contexte B to C.

Pour conclure, ce travail représente une première étape dans l'évaluation de l'orientation relationnelle/ transactionnelle. Cette évaluation représente des enjeux managériaux certains. En effet, savoir identifier les attentes du consommateur en terme de relation permet de mieux allouer les ressources financières du vendeur et de l'entreprise. Ce travail doit aboutir à un outil de segmentation performant en terme de gestion des échanges.

Ce mémoire permet aussi, d’avoir une meilleure compréhension du concept de marketing relationnel et de son approche dans le secteur bancaire. Au vu de littérature récente qui devient de plus en plus prolifique en la matière grâce aux contributions de chercheurs et praticiens, plusieurs propositions de recherches futures ont été émises par ces derniers.

Tout d’abord, pour Bergeron, Ricard et Perrien (2001) qui ont étudié les facteurs d’influence de la fidélité des clients commerciaux, ils pensent qu’il serait intéressant d’apporter à leur analyse plus de construits notamment liés à l’aspect produit et service (qualité des services électroniques, performance des produits). Ils s’accordent à dire également que la confiance est une notion déterminante qui n’est pas suffisamment à leurs yeux étudiée. Les autres voies de recherche qu’ils indiquent sont plus liées à l’ouverture à international, sur d’autres secteurs d’activité ou sur la cible des particuliers. Ces trois voies de recherche sont récurrentes dans l’intégralité des recherches dans le domaine B to B.

Ensuite, Benamour et Prim (2000) indiquent que leur échelle de mesure portant sur l’orientation relationnelle / transactionnelle dans un contexte B to B et B to C doit être appliquer à l’international (la place du chargé d’affaires n’est pas la même dans les pays anglophones ou scandinaves). Egalement, il faut valider l’idée selon laquelle, même si l’aspect affectif de la relation bancaire apparaît en premier chez les particuliers, cela ne signifie pas qu’ils sont plus relationnels que les professionnels, mais plutôt que les deux groupes donnent une définition différente à un même concept, d’où la nécessité d’utiliser deux échelles de mesure.

Chelkhrouhou, Ricard et Tomlunk (2002) ont démontré le rôle de la " connaissance du client " sur la qualité de la relation entre le client et sa banque ainsi que sa satisfaction. Ces auteurs soulignent l’importance dans les recherches futures de valider les construits, d’étendre ce modèle en y ajoutant d’autres variables stratégiques faisant partie intégrante du marketing relationnel (par exemple, la personnalisation) et également rajouter des mesures de rentabilité (degré de connaissance minimum requis pour conserver les niveaux actuels de qualité de la relation et satisfaction, investissement nécessaire pour améliorer la profitabilité selon les objectifs fixés par l’institution financière).

Pour Prim-Allaz, Perrien Pras (2001), qui ont expliqué les causes de rupture des relations de long terme, ils préconisent de tester l’idée selon laquelle les normes transactionnelles agiraient de façon compensatoire sur les décisions de rupture, alors que les normes relationnelles seraient chacune une cause de rupture. Il serait également pertinent selon eux, de segmenter la clientèle en fonction de l’intérêt qu’elle accorde à la relation et examiner si les facteurs de rupture diffèrent selon les segments.

Dans leur étude sur les perceptions que les clients commerciaux se font de leurs conseillers clientèle, Ricard et Rosenthal (2001) indiquent que cette réflexion doit subir une analyse confirmatoire et être généralisée car elle ne reste que supposition (ne s’adressait qu’à des francophones).

Enfin Ganesh, Arnold et Reynolds recommandent dans l’avenir d’évaluer la valeur de vie de chaque segment de clientèle. Une autre voie de recherche qui n’est pas citée dans cet article mais qui pourrait être intéressant d’étudier dans un contexte B to C, c’est le rôle joué par le bouche à oreille positif. En effet, du fait de la libéralisation de marché de l’énergie allemande, Florian Wangeiheim et Tomas Bayon (2004) ont mené une étude empirique afin d’élaborer une typologie de clientèle, à savoir, les " Stayers " (représentant la même catégorie que dans l’étude de Ganesh), les " Switchers " (correspond au " Dissatisfied Switchers ") et les " Refferal Switchers " (clients qui ont été acquis par le bouche à oreille positif). Les résultats montrent que la dernière catégorie est celle qui est la plus satisfaite et la mieux fidéliser donc semblent intéressant de valider ces informations à l’industrie bancaire.


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